Ma première soirée sans AUCUN enfant

Ce soir, c'était MA soirée. 

J'avais répondu à l'invitation, j'avais bien précisé que je venais sans mes enfants. Bon, je n'avais pas noté la date sur mon agenda car je croyais encore pouvoir m'en souvenir au milieu des 10000 autres sorties de la tribu chez le docteur le kiné le dentiste le garagiste laboratoire supermarché la copine et les divers ---logues.

Du coup, c'est environ 24h avant la sortie fatidique que j'ai réalisé que ce n'était pas en décembre que j'étais attendue mais bel et bien le lendemain !

Ah..!

 Bon là non plus ce n'était pas très embêtant. Autant, en digne maman au foyer, je cours généralement toute la journée (cf paragraphe supra), n'ayant jamais le temps de tout faire et encore moins de me reposer, autant mes soirées sont plutôt désertiques , rythmées par les conversations avec mon homme (ou plutôt les monologues avec un homme qui fait sûrement semblant de m'écouter) , les pleurs de BB Koala ou les 10000 inventions et allers-retours papa/maman qu'elle va faire pour retarder l'heure de se coucher. 

Autant dire que me couchant presque tous les soirs à 23h lessivée, je ne suis pas très partante pour sortir souvent. De toute manière, je n'ai pas grand monde dans le coin avec qui sortir, nous sommes un peu isolés !

Bref, après une journée assez tranquille et ayant réussi l'exploit de trouver dans les placards tous les ingrédients nécessaires au dessert que j'avais promis, je suis partie.

Le coeur léger, bien contente de partir seule, je l'avoue. 15 min avant l'heure, timing parfait. Même à l'heure ! Clyde préparait le diner, je lui ai dit que je n'aimais pas ce qu'il préparait mais qu'il ne s'en fasse pas, je me débrouillerais avec une bricole en rentrant.

C'est lui qui m'a dit que Non justement le principe c'est que je ne mangeais pas là. Ah oui j'avais déjà oublié. Quand tu as pris l'habitude de ne plus sortir de chez toi, tu es un peu perdue quand on t'enlève ta routine.

Entre vérifier que BB Koala portée Q nu juste avant de partir pour un petit câlin ne m'avait pas fait pipi dessus ni bavé dessus, montrer mes belles bottes à mes enfants et faire claquer les talons exprès pour les épater, me sécher un peu les cheveux parce qu'"une douche juste avant de sortir, quand il ne fait que 8 °, c'est pas une très bonne idée", finalement je suis partie en retard. Evidemment.

Clyde m'a attrapée quand je sortais pour me dire que ma boîte avec mes p'tits gâteaux au chocolat était restée sur le plan de travail et que j'aurais sûrement envie de l'amener. Évidemment. Merci mon chéwi.

Je suis arrivée tranquillement, j'aurais presque mis la musique à fond dans la voiture pour célébrer ça. Oui mais voilà, par chez moi, on ne capte que France info ou France Culture.

Là bas j'ai tout d'abord mis mon portable à charger car il clignotait. Pas pu m'empêcher de me dire que je préférais être prévenue si une catastrophe se produisait à la maison et que Clyde partait aux urgences. On ne se refait pas, hein, les mamans.
Je me suis sentie un peu toute seule, j'ai dû me secouer et aller contre mon trac naturel pour aller parler un peu à ces gens que je ne connaissais pas. Je suis venue comme "la mère de", car c'était le repas d'une association de parents d'èlèves, au collège. Mais là bas on n'a pas parlé de nos enfants. Parents ingrats.

J'ai fait la connaissance de plusieurs personnes très intéressantes, j'ai parlé avec le Directeur du collège (pas moins que ça ; je crois que j'étais plus impressionnée que mon Grand car je me sentais rechausser les souliers de quand j'avais 12 ans et que je me cachais derrière tout ce que je pouvais chaque fois que je devais parler. ). Aujourd'hui, je ne rougis plus mais je reste réservée. Pas sûre de moi, n'aimant en tout cas pas être le centre des attentions.

UN militaire fort gradé m'a expliqué les tenants et les aboutissants de son métier. De ses journées. De ces mutations imposées, des conséquences sur la famille de devoir partir plusieurs mois au pied levé. De la carrière que sa femme n'aura pas. J'ai trouvé tout cela passionnant, j'ai appris qu'un colonel dirigeait au moins 1000 hommes, que l'on peut négocier des contrats à plusieurs millions comme si on parlait de 200 €. Je me suis demandée, pour être aussi intéressée et poser autant de questions, à quel point j'étais une femme au foyer désespérée.

 On a parlé , avec le Directeur, congé parental des femmes et carrière, interruption de carrière, absence de carrière. Je suis en congé parental choisi, assumé, et même revendiqué. Mais effectivement le retour au bureau sera Très difficile, pour ne pas dire très compliqué, le jour venu. C'est le seul moment où l'on a parlé "enfants".

A table, j'ai retrouvé une bonne copine que je ne vois que très rarement (dans ce genre d'occasion en fait) car ses enfants sont au lycée, car elle travaille, ...Et j'ai mangé avec le Directeur. Je croyais que ça allait me couper l'appétit comme quand au collège j'avais mangé un jour avec mon amoureux que j'aimais en secret (je n'avais pas pu avaler mon salami, je m'en souviens comme si c'était hier) mais là non. On a même bien discuté. J'ai pu me servir au buffet ,tranquille toute seule, une seule assiette et pas 3 "une pour ma Grande une pour BB, et moi je mange quand ?". Ne penser qu'à moi, et discuter, échanger.

J'ai appris qu'à Madagascar on peut dormir à plusieurs dans un logement pour 8 € la nuit. Que les locaux sont trèssss gentils mais qu'ils n'aiment pas être appelés "africains" et que les officiels mettent un point d'honneur à assurer votre sécurité. Qu'on peut assurer la scolarité complète d'un collégien malgache pour 30 € par mois seulement et que les programmes de parrainage sont la solution idéale pour cela.

 Bref, j'ai un peu parlé, beaucoup écouté, appris. Avec une prof qui se soucie de l'orientation de sa fille de 17 ans et qui aimerait faire du droit mais son père voudrait qu'elle fasse des maths. Avec une secrétaire qui part à la retraite et qui ne fait pas du tout son âge.

Pas de BB Koala qui m'a tiré par la manche ou le pantalon pour venir grimper sur mes jambes et m'empêcher de manger. Pas de Grand Fiston arrivant en nage d'avoir couru pendant deux heures dans la salle avec ses copains et soudain affamé. 

Une assiette à dessert que j'ai pu remplir juste pour MOI . Miam, on s'est tous régalés.

Bref ce soir je n'ai pas été Maman, ni même "mère de". Pas été interrompue, pas été tripotée de partout, pas dérangée. Je n'ai pas eu à chercher au fond de ma poche un mouchoir pour essuyer de la morve au nez. J'ai même réussi, en entendant un "mamaaaan" de bambin au fond de la salle, à ne pas croire que c'était moi qu'on appelait. Saluez l'exploit.

Mais j'ai été tout de même Maman, à un moment. 21h, j'ai envoyé un sms à ma Grande Fille. Une photo de mon assiette. "Regarde ma Grande, tu avais raison : j'ai trouvé une salade de pâtes-papillon ;-) "

 Et puis ah oui aussi quand je suis partie en mettant dans mon sac, bien enveloppée, une part de flanc, pour mon Grand, parce qu'il adore ça.

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